I - ETUDE DE L'ULVA ARMORICANA

I . 1 - Classification et description de l’algue
L’ulva armoricana appartient au genre ulve. Sa classification scientifique est la suivante :
- Domaine Eukaryota (dont les cellules contiennent des noyaux)
- Division : chlorophyta (ce qu’on appelle les « algues vertes »)
- Classe : Ulvophyceae (une sous-partie de la division chlorophyta dans laquelle on place les ulves)
- Ordre : Ulvales (algues en thalles formée de lamelles en deux couches cellulaires)
- Famille : Ulvaceae (algue verte en fine « feuilles »)

On trouve cette ulve en suspension dans l’eau. Elle n’est attachée à aucun substrat. À l’échelle macroscopique, on voit que l’ulva armoricana est organisée en thalles. Un thalle adulte a une taille qui varie entre 15cm et 60cm à la belle saison et entre 10cm et 15cm en hiver. Les lames d’un thalle sont dentelées sur le rebord et d’un vert plus ou moins foncé. Elles sont très fines : une épaisseur qui varie entre 30µm et 40µm. Ainsi, elles se déchirent facilement et sont très fragiles. Elles sont constituées de deux couches de cellules accolées.

À l’échelle cellulaire, on remarque qu’elle possède des cellules de forme géométrique séparées par une lamelle moyenne assez épaisse. On y observe un chloroplaste en bout de cellule (voir schéma). Elle diffère des autres ulves par son nombre de pyrénoide : chaque cellule en contient en général un ou deux. Selon leur position dans l’algue même, les cellules auront un chloroplaste plus ou moins grand contenant toujours peu de pyrénoides.


I.2 - Les conditions environnementales propices au phénomène de « marées vertes »


Il faut que les conditions environnementales conviennent à une bonne croissance des ulves. On distingue deux principaux facteurs environnementaux : l’éclairement, la dérive résiduelle et la richesse en nutriment du milieu.

1) L’éclairement

Il faut d’abord que les ulves, très photophiles, aient accès à suffisamment de lumière. En effet, d’octobre à février, on observe une un arrêt de la prolifération des ulves. Cette période correspond au moment où le jour est le plus court et l’éclairement plus faible. Par contre, au début du printemps, quand la durée et l’intensité d’éclairement redeviennent suffisantes, les ulves reprennent leur croissance très rapidement (voir figure 4). Aussi, on ne peut avoir d’ulves accrochées à un substrat ou disposées en épaisses couches au fond de l’eau car celles entassées au-dessus feraient de l’ombre à celles en-dessous. On appelle ce phénomène « l’auto-ombrage ». Ainsi, on observe que les thalles sont détachés du fond, en suspension dans l’eau. Par conséquent, ils peuvent occuper un volume d’eau important et bien éclairé. Ils ont aussi besoin de se trouver dans une zone côtière de moins de 2 mètres de profondeur avec une turbulence suffisante pour les maintenir en suspension dans une eau bien éclairée. Ainsi on observe une biomasse d’algue très importante sur la zone de déferlement des vagues sur le sable (voir figure 3) et dans les lagunes. Toutefois, on remarque dans certaines baies bretonnes, comme celle de Douarnenez, que la zone de croissance des ulves s’étend jusqu’à 15 mètres de profondeur. On peut expliquer ce contre-exemple par la forte houle, par les sables purs qui réverbèrent la lumière et par la transparence de l’eau qui permettent la dispersion des algues en restant dans des fonds sous-marins bien éclairés.

1) Les marées
Il faut que la géographie du site profite au confinement de la biomasse d’ulve formée, sinon on n’observerait pas d’importante accumulation d’algues. L’exemple le plus simple à concevoir est celui des « marées vertes » dans les lagunes. Celles-ci communiquent peu avec la mer et on y note un confinement des eaux. Par contre, pour des baies plus ouvertes vers le large, il est nécessaire de parler du confinement dynamique par la marée. Une modélisation mathématique de Menesguen et Salomon datant de 1988 a montré que le confinement des thalles en suspension a lieu dans des zones où la dérive résiduelle de marée, c’est-à-dire la dérive nette au bout d’un cycle de marée, soit 12h 25 min, est quasi-nulle en raison de la topographie du fond. Au contraire, une forte dérive résiduelle disperse les nutriments et les algues. Une baie plutôt pauvre en nutriment mais avec une dérive résiduelle faible peut être remplie d’algues (Baie de Lannion en Côte d’Armor, voir figure 5) alors qu’une beaucoup plus riche mais avec une dérive résiduelle forte en sera vide (baie de Goulven en Finistère Nord).

1) La richesse en nutriments du milieu
La prolifération des algues vertes résulte, comme dit en introduction, d’une modification envirronementale puisqu’on observe ce phénomène que depuis les années 50. Dans le cas de la Bretagne, on parle d’eutrophisation côtière c’est-à-dire l’enrichissement en nutriments des côtes. Pour se développer, les ulves ont besoin d’azote et de phosphore.
Les algues vertes sont nitrophiles, c’est-à-dire qu’elles ont besoin de beaucoup de nitrates pour assurer le développement,entre autres, de leur appareil chlorophyllien. On trouve peu d’azote inorganique dissous en mer c’est pourquoi les côtes, alimentées continuellement en azote, sont propices aux « marées vertes ». On a observé dans les thalles eux-mêmes une chute de leur teneur en azote en fin de printemps jusqu’à devenir insuffisante en Août. En effet, l’azote déversé par les rivières et l’eau du large ne suffit plus aux tonnes d’algues qui se sont développées. Pour le phosphore, on observe une légère baisse de la teneur au même moment (voir graphique).
Baisse du pourcentage du poids sec d’azote des ulves entre les mois d’avril et juillet 1991 :
((0.8-4.5)/4.5)*100=82%
Baisse du pourcentage du poids sec de phosphore des ulves entre les mois d’avril et de juillet 1991 :
((0.32-0.49)/0.49)*100=35%





flux d’azote et de phosphore en juin 1996 et la biomasse d’ulves atteinte en juillet dans le sud de la Baie de Saint-Brieuc


Pour déterminer l’équation de la droite représentant l’évolution de la biomasse maximale d’ulves en fonction du flux d’azote :
1.3cm sur l’axe des ordonnées représente 5000t d’ulves. (5000*0.1)/1.3=385
Ainsi, sur la courbe, 0.1cm 385t sur l’axe des ordonnées.
1.6cm sur l’axe des abscisses représente 1000kg d’azote par jour. (1000*0.1)/1.6=62.5
Ainsi, sur la courbe, 0.1cm 62.5kg sur l’axe des abscisses.
On prend deux points A(1625 ; 15000) et B(2000 ; 18095).
Y=mx+p
m=(yB-yA)/(xB-xA)
m=(18095-15000)/(2000-1625)
m=3095/375
m=619/75

p est l’ordonnée à l’origine soit 385
Ainsi, on a une courbe définie par y=619/375*X+385
(cet aspect de la relation entre les flux azotés et la biomasse d’ulve sera précisé dans la deuxième partie)

Ce graphique fait apparaître la relation qu’il y a entre les apports d’azotes et la biomasse d’ulve selon les années. En 1986, ils étaient tous les deux très élevés en raison de fortes pluies et donc d’un lessivage important des terres agricoles entraînement un flux important d’eau de rivière riche. On observait l’inverse en 1989 et 1990 : peu de pluies donc moins d’azote issu de l’agriculture apporté par les rivières.
On voit sur le graphique que le phosphore ne joue aucun rôle dans la prolifération des ulves.

De plus, si on supprime les apports en nitrates par les rivières dans les baies, cela réduit la marée verte de 95%.

Pour conclure, après des années de recherche on a réussi à identifier précisément le mécanisme entraînant les marées vertes. Si on en a identifié les causes, on est encore en recherche de solutions durables et efficaces.

I . 3 - La décomposition des algues vertes

L’ulva armoricana est constituée, comme tous les êtres vivants, de carbone, d’hydrogène, d’oxygène, d’azote, de souffre, de phosphore,… Lorsque les ulves sont entassées sur les plages, soumises aux changements climatiques, elles entrent en décomposition. À ce moment là, elles dégagent des gaz qui viennent de la combinaison des éléments qui la composent comme le méthane, CH4 composé du carbone et de l’hydrogène, l’ammoniac NH3, composé de l’azote et de l’hydrogène, des oxydes d’azotes, composé d’azote et d’oygène, ou encore du sulfure d’hydrogène, H2S, composé du souffre et de l’hydrogène. Ce dernier n’est pas dégagé en continue : il est stocké dans des poches qui éclatent lorsque l’on marche dessus, par exemple. De plus, il dégage une odeur nauséabonde.
L’ammoniac est toxique : il irrite les voies respiratoire. Mais c’est le sulfure d’hydrogène le plus dangereux : il bloque la respiration cellulaire. L’organisme tolère 10ppm pendant huit heures. Dès 200ppm, le sulfure d’hydrogène peut entraîner une perte de connaissance et une exposition prolongée la mort.

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